EXEMPLE CONCRET DE PETITE CHUTE AVEC TURBINE

Un de mes visiteurs qui a acquis une petit chute assez merveilleuse d"ailleurs , m'a demandé conseil .

La chute est de 15 mètres ; le débit , très instable , passe rapidement de 0.5 à 1 , ou 2 , voire 3 m3/s et plus
Tout est à refaire et il voudrait ne pas rétablir le canal d'amenée d'une longueur de quelques 200 m qui doit être en très mauvais état et le remplacer par une conduite de 250 m.
La question qui se pose est de choisir le débit de la turbine.
Pour bien résoudre ce problème il faudrait connaître la courbe des débits classés.
Et il faudrait en prenant plusieurs hypothèses , calculer le coût de l'investissement , la production annuelle en Kwh ,et ainsi comparer les rentabilités.

Nous allons faire un petit calcul dans cet exemple mais en laissant de coté la question financière

Hypothèse 1 : Equiper pour un débit max de 1 m3/s

Avec une chute nette ramenée à 14 m compte tenu des pertes de charges (conduite, vannes, ..)
notre logiciel nous donne une puissance de 137 Kw théoriques et 116 Kw sur l'arbre avec un rendement de 85%
Nous avons choisi de tourner assez vite , soit 525 T/min (500 étant la vitesse de synchronisme de la génératrice asynchrone avec un glissement (négatif) de 5% ; c'est une machine à 12 pôles pour du 50 Hz et 10 pôles pour du 60 Hz ).
Cette solution évite le coûteux multiplicateur.
Nous découvrons que notre machine sera une Francis moyenne de Ns 244 environ.
Nous acceptons cette valeur.
La roue aura un diamètre d'entrée de 0.46 m  et de 0.52 en sortie ; le distributeur une hauteur de 0.19
ces valeurs étant évidemment des valeurs de pré calcul.
Les dimensions définitives seront fixées par le constructeur de la turbine.
On voit de suite que la conduite devra se terminer par un cône de rétrécissement important , afin de s'adapter à l'entrés dans la bâche spirale , dont le diamètre sera communiqué par le constructeur.
En fait comme dit ci dessous une vanne sera interposée.
Ce Ns permet encore d"assez bons rendements aux débits fractionnaires, mais il n'est guère souhaitable de monter plus haut en Ns.
Au passage notons qu'une turbine Banki , bien moins onéreuse , demanderait un multiplicateur de vitesse car son Ns ne dépasse guère 80 et son rendement est moins bon .
L'économie est donc à bien étudier.

La puissance électrique sera avec un rendement de 0.9 de la génératrice , de 104 Kw.
Il est primordial pour des raisons de prix de chercher à se rapprocher d'une puissance normalisée : nous utiliserons donc un moteur de 100 Kw de catalogue qui fonctionnera en génératrice.
Ce sera un moteur triphasé 400/690 volts ou 230/400

Calcul de la conduite (longueur : 250 m)
Notre visiteur nous a demandé comme dit de prévoir une conduite forcée pour ne pas avoir à refaire le canal d'amenée.
Ce n'est pas une solution économique ! et un canal en bon état a une perte de charge  moindre, cependant nous allons l'étudier.
En limitant à 0.50 m  la perte de charge pour la conduite seule nous aurons une conduite de 800 mm de diamètre !  et encore dans l'hypothèse de tuyaux lisses .
Cette valeur nous est donnée par mon logiciel qui effectue les calculs sur la base des travaux de Scimemi
La nature  des parois de la conduite est à préciser.
Si on prend de l'acier soudé  l'épaisseur calculée pour la pression la plus forte est de l'ordre de 1 mm , épaisseur à doubler au moins pour tenir compte de la corrosion.
Il y aura lieu aussi de vérifier si une cheminée d'équilibre est nécessaire à la fin de la conduite.

Avec 100 Kw , on pourrait compter sur une production annuelle entre 300000 et 400000 kwh
Il faut voir avec le distributeur du réseau quelle serait la recette correspondante.

Hypothèse 2 : Equiper pour un débit max de 0.5 m3/s
Les valeurs ci dessus passent à 50 Kw , 770 T/min pour roue de même Ns qui est évidemment plus petite

Pour la conduite , un diamètre de 600 mm conviendra.
La production est  divisée par 2 environ

Description sommaire de l'équipement complet

Prise d'eau
Elle s'effectue dans un torrent
Il faut donc construire un petit "barrage" , avec déversoir pour l'évacuation des crues.

Ce barrage sera de faible hauteur : 2 mètres maximum 
Son mode de réalisation dépend essentiellement de la topographie du terrain et de sa nature
A priori , un barrage de type poids s'impose , mais attention aux fondations.
Cet ouvrage ne doit pas être emporté par le torrent.

La prise d'eau , à la partie basse , sera protégée par une grille.
L'espacement entre barreaux de la grille devra être précisé par le constructeur de la turbine.
Immédiatement après cette prise d'eau la conduite doit comporter obligatoirement une vanne de tête qui sera donc un vanne de 800 mm.
En principe , cette vanne devrait être à fermeture automatique en cas de sur débit : exemple : rupture de la conduite forcée pour une cause imprévue (défectuosité de l'acier (rare) , accident , attentat , ..)

Dans le bâtiment ou se trouve la machine.

Une vanne de fermeture de la turbine
Compte tenu du rétrécissement mentionné ci dessus , cette vanne pourra être de plus faible diamètre : 200 à 300 mm.
Cette vanne de sécurité permet d'arrêter le groupe en cas d'emballement suite à un blocage du vannage.
Le vannage qui sert au réglage du débit n'est pas  à confondre avec cette vanne de sécurité qui devra être ouverte en grand ou fermée , jamais en position intermédiaire.
La turbine elle même est une machine en bâche spirale , horizontale, le coude de sortie  se prolonge vers l'aspirateur diffuseur et le canal de fuite.
La génératrice est accouplée en ligne directe.
Les machines sont positionnées sur des massifs en béton de bonne taille : la manutention des machines au montage démontage doit être prévue par des crochets de levage pouvant recevoir des palans.
La structure supérieure du bâtiment doit être réalisée en conséquence.

Commande du vannage

Le régulateur de vitesse - fort coûteux - est évité par le couplage de la génératrice au réseau de distribution.
Mais le vannage doit obéir à un organe de commande "intelligent"
Cet organe devrait adapter à chaque instant le débit à l'ouverture , ce qui est évidemment impossible.
De plus , il faut se prémunir contre un vidage malencontreux de la conduite qui entraînerait de regrettables perturbations.

Il faut donc procéder par retouches périodiques.

La période de retouche est fonction d'un paramètre que nous allons explorer.
L'élément directeur ne peut être que la pression. Si le débit tend à baisser , la hauteur d'eau diminue dans la prise d'eau et aussi la pression .dans la conduite. Mais lire la pression à l'arrivée près de la roue est trop imprécis , il faut donc que le capteur soit à la prise d'eau , ce qui ne pose pas de problème avec un petit câble électrique.
On va découvrir maintenant que nous manquons de volume d'eau à la prise d'eau et que la solution conduite est presque impossible.

Avec un canal de 200 m environ , nous aurions un réserve d'eau importante .Par exemple avec un canal de section 2 m2 , il y aurait une réserve de 400 m3 dont la moitié au moins serait "utilisable" comme "constante de temps"
Ici nous nous rapprochons de l'électrotechnique !
En clair , cela signifie qu'il suffirait de faire des réglages avec une périodicité de 100 à 200 secondes 'ordre de grandeur)
De plus le pas de réglage doit varier continuellement , pour éviter le "pompage" en retombant continuellement sur des positions d'ouverture identiques et fausses.
Enfin il ne faut pas fatiguer le vannage par des manoeuvres trop fréquentes .

(Si la prise d'eau déverse , l'ouverture devra être au maximum )

Un tel type de commande est réalisable en électrotechnique avec des cascades de relais dont certains sont temporisés.
Un tel système existait dans une petite centrale que j'avais automatisée dans les années 1950 et j'en ai toujours le schéma.
Aujourd'hui ,l'électronique a du prendre le relais , et il doit exister des constructeurs qui livrent l'interface nécessaire sous forme d'une carte .
Mais certains pourront aussi imaginer et construire cette carte
Enfin il est très facile de commander tout cela merveilleusement avec un PC et un petit logiciel ad hoc.
On peut alors associer le pas de réglage à un générateur de nombres au hasard , afin de finir par trouver une position d'équilibre entre le débit et l'ouverture du vannage.
Que ceux qui ont de vieux PC 286 à 486 ne les jettent pas à la décharge , on peut en faire de merveilleux outils pour programmer n'importe quelles fonctions ou à peu près , en travaillant sous DOS.

Le moteur de vannage.
Ce moteur doit être disponible , même si le courant du secteur ne l'est plus. Alors il faut fermer pour éviter l'emballement du groupe. On a compris que non seulement le moteur doit être en courant continu , mais qu'il doit être alimenté par batterie (12 V. par ex.)
Ce moteur de faible puissance (50 w env.) sera associé à un réducteur 
Cette batterie doit évidemment aussi alimenter la partie électronique
Dans le cas de PC , il faudra un petit onduleur.

Tableau électrique de puissance
Il comporte la surveillance de la vitesse par tachymètre ou par le PC , l'enclenchement automatique au synchronisme , les protections de sur intensité , l'enclenchement différé des condensateurs, la séparation du réseau en cas de nécessité , etc....etc..

Liaison au réseau de distribution
Le réseau va nous imposer ses exigences comme à tous les producteurs autonomes

Il sera nécessaire d'amener une ligne Haute tension si le réseau basse tension est inadapté à l'absorption de cette puissance.
De plus il faudra un poste de transformation et un tableau de comptage et de protection pour éviter le renvoi de tension sur un réseau que le distributeur estime avoir mis hors tension pour travaux par exemple.
Le distributeur (EDF en France) établira un devis pour toute cette partie.

Enfin le distributeur exigera probablement la compensation de l'énergie réactive , ce qui se fera par l'installation d'une batterie de condensateurs.
La puissance de la batterie sera de l'ordre de 60 KVAR (pour une génératrice  de 100 KW) , les éléments montés en triphasé seront raccordés à la tension de la génératrice et non coté haute tension.

Curage du canal de fuite
Tout obstacle à l'écoulement est nuisible aussi aussi bien en amont qu'en aval .
Plus le canal sera propre , plus bas sera le niveau de l'eau et la chute en sera d'autant augmentée.

Bâtiment
il y aura sans doute lieu de faire quelques aménagements et réparations au bâtiment


Tels sont les éléments qui devront être chiffrés et n'en oublier aucun !
Malheureusement l'addition sera assez lourde , et la rentabilité difficile si on se trouve dans un pays qui ne favorise pas les énergies renouvelables en ne payant pas le KWh à un prix convenable.

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