L’hydraulique
est une des activités les plus anciennes de la civilisation humaine,
puisqu’elle commande toutes les utilisations de l’eau.
Dès
l’Antiquité, on retrouve les traces d’ouvrages hydrauliques (canaux
d’assainissement de la vallée du Nil, 4 000 ans avant l’ère chrétienne).
Mais jusqu’à la Renaissance et la clarification des principes élémentaires
de la mécanique, cette activité est demeurée un art sans bases scientifiques.
Cela n’a pas empêché les anciens constructeurs d’édifier des ouvrages
admirables tels que les aqueducs romains ou, sous l’impulsion de Louis XIV
à Versailles, la célèbre machine de Marly.
Le
développement ultérieur de l’hydraulique repose essentiellement sur l’amélioration
des outils mathématiques et sur les notions de mécanique qui prirent un large
essor au XVIIe siècle.
Pascal (1623-1662)
apporta ainsi une très
importante contribution à l’hydraulique en donnant sa forme définitive à la
théorie de l’hydrostatique. Daniel Bernoulli (1700-1782), dans son ouvrage Hydrodynamica ,
passe en revue la plupart des problèmes hydrauliques de l’époque. On lui
doit le célèbre «théorème de Bernoulli» qui est constamment utilisé dans
cette science.
Du
XVIIe
au XXe siècle,
le développement de l’hydraulique accompagne alors le progrès général des
sciences et des techniques, avec les contributions magistrales de Léonhard
Euler (1707-1783), Louis de Lagrange (1736-1813), Pierre du Buat (1734-1809),
Jean-Louis Marie Poiseuille (1799-1869), Adhémar Barré de Saint-Venant
(1797-1886), William Froude (1818-1879), Henri Navier (1785-1836), Joseph
Boussinesq (1842-1929), Osborne Reynolds (1842-1912), pour ne citer que
quelques-uns des principaux fondateurs de l’hydraulique moderne.
Cette
science maintenant étend ses frontières au-delà de son domaine traditionnel.
La recherche hydraulique se développe très largement dans des laboratoires
industriels ou universitaires. Aux outils traditionnels tels que les essais sur
modèles réduits, sont venues s’ajouter les techniques de simulation numérique
sur ordinateur, et aussi toutes les possibilités de l’électronique et de la
microélectronique qui permettent d’acquérir et de traiter des quantités
sans cesse croissantes de données expérimentales.
L’hydraulique
aborde dès lors des domaines de plus en plus complexes, parmi lesquels on peut
citer l’étude approfondie des ondes de surface (marées, déferlement des
vagues, etc.), la détermination des champs tridimensionnels de vitesses (écoulements
dans les cuves de réacteurs nucléaires), la turbulence en écoulements
diphasiques (transport et dépôt des particules solides en suspension).
1. Les domaines
de l’hydraulique
L’hydraulique,
c’est-à-dire la science de l’écoulement de l’eau, ou plus généralement
des liquides, est utilisée dans de nombreux domaines, la plupart du temps
concurremment avec d’autres techniques (résistance des matériaux, mécanique
des sols, géologie, météorologie, etc.).
– Les
aménagements hydroélectriques :
avec le charbon, la houille blanche a joué un rôle essentiel dans la révolution
industrielle de la fin du XIXe siècle.
La crise énergétique n’a pu être surmontée qu’en développant à la fois
les trois ressources naturelles essentielles: le charbon, le nucléaire et
l’hydraulique. Cette dernière présente l’avantage d’être une énergie
parfaitement renouvelable. On estime que sa contribution au bilan énergétique
mondial s’élèvera à 3 000 milliards de kWh en l’an 2000, cet
accroissement se réalisant, pour la plus grande part, dans les pays d’Afrique
et d’Amérique du Sud. Les aménagements hydroélectriques posent des problèmes
hydrauliques divers. Ils concernent les prises d’eau, les barrages, les
vannes, les conduites et galeries d’amenée ou de fuite, les cheminées d’équilibre,
les évacuateurs de crues, etc.
– L’hydraulique
fluviale a pour objet l’étude de
l’écoulement des crues et la protection contre les inondations (certains
fleuves comme le Gange, l’Amazone, échappent encore totalement à la maîtrise
de l’homme et continuent à défier la technique). Elle intervient dans l’étude
des canaux de navigation, le calibrage des rivières pour la protection des
berges et le maintien d’un chenal navigable, l’étude des ouvrages de
navigation intérieure (barrages, écluses).
– L’hydraulique
maritime doit envisager la
protection des ports contre la houle, l’étude de la stabilité des digues et
des jetées, la lutte contre l’érosion des plages, l’ensablement des entrées
de ports, l’envasement des bassins et l’étude des courants de marée.
– L’hydraulique
urbaine vise à fournir de l’eau
aux villes et à évacuer les eaux usées, elle exige de résoudre de nombreux
problèmes d’hydraulique qui vont de la recherche de l’eau (puits, captages,
prises en rivière, etc.), à l’adduction d’eau (conduites, aqueducs,
canaux), à l’épuration et au traitement des eaux, à la distribution d’eau
(stations de pompage, comptage), à l’évacuation (réseaux d’égouts) et au
traitement des eaux usées.
– L’hydraulique
agricole consiste à fournir de
l’eau pour les cultures et suppose la recherche et la captation de l’eau
(cf. supra ), son stockage (barrages pour l’irrigation), sa
distribution (canaux, pompage, comptage), son utilisation (ruissellement,
aspersion, submersion...) et le réglage du niveau de la nappe phréatique
(drainage, recharges).
– L’hydraulique
souterraine fait partie d’un
domaine plus vaste, constitué par l’étude générale des fluides dans les
milieux poreux. Les applications sont très nombreuses. Citons entre autres: les
écoulements de nappes souterraines, les bilans hydrologiques, l’étude des
puits et des forages, l’infiltration sous les ouvrages, la stabilité des
digues en terre, l’irrigation et le drainage, la diffusion de la pollution
dans les nappes souterraines.
– Les
commandes hydrauliques : il
s’agit là d’une technique qui concerne la transmission d’énergie par le
moyen de liquides appelés «liquides hydrauliques» (freins hydrauliques,
servo-commandes hydrauliques, etc.). L’hydraulique y intervient pour le calcul
des pertes de charge dans les canalisations, mais les problèmes y sont surtout
de nature technologique (dispositifs de distribution, pompes à huile, etc.).
2. Écoulement
des fluides et théorèmes généraux
Les
lois de la mécanique d’un corps solide s’obtiennent en intégrant dans le
volume occupé par ce corps les lois de la mécanique du point matériel.
D’une
manière identique, les lois de l’hydraulique utilisées dans la pratique par
les ingénieurs s’obtiennent en intégrant d’une manière exacte ou approchée
les lois décrivant le mouvement d’un petit élément de volume fluide.
Alors
que dans un solide la position relative des différents points matériels
composant ce solide est invariable, dans un liquide chaque élément de volume
est animé d’un mouvement qui diffère de celui des éléments voisins, de
sorte que le fluide peut se déformer au cours de son mouvement. Les
interactions qui résultent de ces mouvements relatifs sont des forces de
surface appelées forces de pression lorsqu’elles agissent dans la direction
normale à la surface considérée, et forces de frottement lorsqu’elles
agissent tangentiellement à cette surface.
En
hydraulique, les forces de frottement par unité de surface, c’est-à-dire les
contraintes tangentielles, sont proportionnelles aux vitesses de déformation:
Le
coefficient de proportionnalité m
s’appelle le coefficient de viscosité dynamique du fluide.
Résoudre
un problème d’hydraulique consiste le plus souvent à répondre à la
question: que se passe-t-il en un point donné de l’espace occupé par un
fluide en mouvement? Cette méthode de résolution donne, en un point P(x ,
y, z ) quelconque du domaine occupé par le fluide, le vecteur
vitesse V(P,t ) de composantes u , v, w et
la pression p (P, t ).
Les
quatre équations fondamentales qui permettent, en hydraulique, de déterminer
les quatre inconnues u , v, w et p sont
fournies par la condition de continuité (une équation scalaire traduisant la
conservation de la masse) et par le principe de conservation de la quantité de
mouvement (une équation vectorielle).
En
précisant convenablement les conditions aux limites à satisfaire (condition à
la surface libre d’un écoulement, conditions le long d’une paroi solide,
etc.) on parvient dans certains cas à obtenir des solutions particulières aux
équations générales décrites ci-dessus.
L’approche
la plus puissante consiste à résoudre numériquement ces systèmes d’équations
aux dérivées partielles par des méthodes qui utilisent des discrétisations
en différences finies ou en éléments finis et en mettant à profit les
capacités et les vitesses de calcul sans cesse croissantes des ordinateurs pour
utiliser des algorithmes de résolution extrêmement performants.
Si
on intègre l’équation différentielle du mouvement le long d’une courbe (C)
ou dans un volume (D), on obtiendra une relation générale entre deux
grandeurs inconnues, la vitesse V et la pression p .
Dans
le cas du mouvement d’un fluide parfait (c’est-à-dire dépourvu de viscosité),
irrotationnel (dont aucune particule n’est animée d’un mouvement élémentaire
de rotation), et permanent (indépendant du temps), cette relation revêt la
forme simple suivante:
V*V / 2*g +p /rg +z=constante
Les
applications de l’équation de Bernoulli sont extrêmement nombreuses en
hydraulique. On en déduit directement la formule de Torricelli V = 2g H
donnant la vitesse d’écoulement par un orifice sous une hauteur d’eau H.
Le venturi, dispositif servant à mesurer les débits dans les conduites, est également
une application directe de l’équation de Bernoulli, de même que les
diffuseurs placés à la sortie des turbines pour la récupération de l’énergie
cinétique.
Un
autre théorème fondamental extrêmement important en hydraulique est le théorème
des quantités de mouvement, ou théorème d’Euler.
Pour
appliquer le théorème des quantités de mouvement à un fluide en mouvement
permanent, on choisit une surface fermée de référence (S) et on écrit que le
débit de quantité de mouvement (débit en masse Z
vitesse) sortant de (S) est égal à la somme des forces extérieures agissant
sur le fluide contenu dans (S).
Parmi
les applications classiques de ce théorème, on peut citer le calcul de la
force exercée par un jet sur un obstacle (F=rQV),
la détermination du coefficient de contraction d’un orifice à la Borda (a = 0,5),
le calcul de la perte de charge due à un élargissement brusque (H = (V1 _ V2)2/2g ),
etc.
3. Divers types
d’écoulement
La
viscosité de l’eau étant faible (à 20 0C,
= 0,001 N.s/m2),
on peut souvent en première approximation négliger les forces de frottement
qui en résultent. C’est l’hypothèse dite du fluide parfait.
Dans
certains cas, au contraire, la viscosité prend une importance prépondérante.
Les écoulements correspondants sont les écoulements laminaires. La viscosité
est prépondérante également dans les écoulements de filtration (écoulement
de l’eau dans les sols). On peut apprécier l’importance relative des forces
de viscosité, par rapport aux autres forces en jeu, en introduisant un nombre
sans dimension R, qui est le rapport des forces d’inertie aux forces de
viscosité; R est appelé le nombre de Reynolds. Il se calcule à partir de la
connaissance d’une vitesse V caractéristique de l’écoulement, d’une
dimension L également caractéristique de l’écoulement, et du
coefficient de viscosité dynamique m
(ou du coefficient de viscosité cinématique n):
Si
R est nettement inférieur à une valeur critique Rcr=2200, l’écoulement est
laminaire. Les tourbillons engendrés par les obstacles et les freinages
visqueux aux parois, au contact desquelles la vitesse est nulle, arrivent la
plupart du temps à créer dans l’écoulement un régime fluctuant appelé régime
turbulent. Les vitesses et les pressions y fluctuent de manière aléatoire
autour de valeurs moyennes. C’est ce type d’écoulement que l’on rencontre
le plus souvent en pratique. Le nombre de Reynolds correspondant y est nettement
supérieur à la valeur critique Rcr (le plus souvent de plusieurs ordres de
grandeur). La pratique industrielle fait rencontrer encore d’autres types d’écoulements
(écoulements diphasiques gaz-liquide ou solide-liquide, écoulements stratifiés
avec courants de densité, etc.).
– Écoulements
à potentiel : les écoulements
originaires d’une zone en équilibre sont à potentiel dans la région où les
perturbations dues à des parois ou à des obstacles ne se
font pas sentir. Les vitesses dérivent d’un potentiel (V = grad W)
et l’écoulement est irrotationnel (Rot V = 0).
Les
méthodes d’études des écoulements à potentiel peuvent être mathématiques
(fonctions analytiques), ou graphiques (tracés de Prasil) ou encore analogiques
(cuves rhéoélectriques).
Parmi
les applications importantes des écoulements laminaires, il faut citer la
lubrification des paliers et la viscosimétrie. – Écoulements
turbulents :
dans ces écoulements, les vitesses sont sujettes à des fluctuations autour de
leurs valeurs moyennes. Ils ne peuvent donc être permanents qu’en moyenne
seulement. À chaque instant, le vecteur-vitesse V
est la somme d’une vitesse moyenne _V
et d’une fluctuation turbulente v(t )
dont la moyenne dans le temps est nulle. Cette fluctuation v
a trois composantes vx ,
vy ,
vz ,
dont les amplitudes sont caractérisées par leurs valeurs quadratiques moyennes
vx 2,
vy 2,
vz 2.
La
turbulence est dite isotrope si, en chaque point, ces trois valeurs sont égales
entre elles. Elle est dite homogène si elles ont la même valeur en tous les
points de l’écoulement.
Les
variations dans le temps de ces composantes ont un caractère aléatoire. On
peut les caractériser par des spectres continus de fréquences, allant de
quelques Hz à quelques milliers de Hz. Ces fluctuations sont dues à des
tourbillons dont la taille est très variable.
L’étude
de la turbulence et de ses mécanismes de génération a été longtemps limitée
au seul aspect expérimental, lequel présente du reste de nombreuses difficultés.
Depuis l’existence de très puissants ordinateurs vectoriels permet de
concevoir la simulation numérique d’écoulements turbulents. Les schémas de
développement de tourbillons ainsi testés permettront de mieux comprendre les
transferts d’énergie entre structures de différentes échelles.
– Écoulements
en couche limite : au voisinage
d’une paroi, le fait que la vitesse soit nulle à la paroi crée un fort
gradient de vitesse dans une zone appelée couche limite, qui peut être
laminaire ou turbulente, et dont l’épaisseur caractérise la dimension de la
zone intéressée. Si l’on introduit le nombre de Reynolds R = V e x /n,
x étant la distance comptée vers l’aval de l’écoulement sur
une plaque plane, à partir du bord d’attaque de la plaque, l’analyse
dimensionnelle montre que l’épaisseur d
de la couche limite à l’abscisse x doit être telle que: d/ x = f (R).
L’expérience
et le calcul révèlent que, si l’on part du bord d’attaque, la couche
limite, d’abord laminaire, se développe et devient turbulente pour une valeur
de R comprise entre 105
et 106.
L’épaisseur relative de la couche limite laminaire est donnée par: d/x =
5 R_1/2.
Les
phénomènes de couche limite sont essentiels dans la compréhension des échanges
thermiques entre fluides et parois solides (échangeurs de chaleur).
4. Écoulements
en conduites et à surface libre
Les
problèmes d’écoulements en conduites se posent dans de nombreuses activités
industrielles (distribution d’eau, usines hydro-électriques, irrigation,
pipe-lines, etc.).
Pour
transporter un débit Q sur une certaine distance, il faut déterminer les
caractéristiques de la conduite par un calcul économique tenant compte de sa résistance
mécanique, de la pression du fluide et des pertes de charge linéairement réparties
ou localisées.
Les
pertes de charges linéairement réparties se calculent (dans le cas des
conduites circulaires rectilignes) à l’aide de la formule dite universelle:
H:
perte de charge en hauteur du fluide qui s’écoule.
V: vitesse moyenne de l’écoulement.
D: diamètre de la conduite.
g :
accélération de la pesanteur.
l:
coefficient sans dimension fonction du nombre de Reynolds de l’écoulement et
de la rugosité de la conduite.
Le
coefficient de perte de charge peut être calculé à l’aide de formules
empiriques ou déterminé à l’aide du diagramme de Moody
.
Les
écoulements en canal ou en rivière sont à surface libre. La force motrice de
ces écoulements est la pesanteur. Selon leurs caractéristiques, on distingue
les écoulements uniformes, graduellement variés et rapidement variés.
– Les
écoulements uniformes. Les caractéristiques
de l’écoulement (tirant d’eau, section mouillée, périmètre mouillé,
etc.) ne varient pas d’une section à l’autre. La surface libre a même
pente i
que le fond. La perte de charge H sur un parcours L est H = Li .
Le
débit se calcule par des formules empiriques telles que la formule de Chezy V = C RHi
ou la formule de Strickler V = K RH2/3i 1/2
(dans chacune de ces formules, V désigne la vitesse moyenne de l’écoulement
en m/s, RH le rayon hydraulique – c’est-à-dire le quotient de la
surface mouillée par le périmètre mouillé – en m, i la
pente du radier et C ou K des coefficients empiriques qui ne sont pas sans
dimensions).
– Les
écoulements graduellement variés. Les
caractéristiques de l’écoulement varient très lentement en fonction de
l’abscisse x le
long du canal ou de la rivière. Les méthodes d’étude consistent toutes à
remplacer le canal par une succession de tronçons prismatiques dans chacun
desquels on admet que l’écoulement est uniforme. Parmi ces méthodes, qui ont
pour objet le calcul de la position de la surface libre (ou courbe de remous),
il faut citer celles de Bresse et de Bakhmeteff.
– Les
écoulements rapidement variés. Lorsque
les courbures des filets liquides sont importantes, l’écoulement est dit
rapidement varié. C’est le cas lors du franchissement de seuils ou de déversoirs,
ou lors de variations soudaines de profondeur donnant lieu au phénomène de
ressaut hydraulique. Les méthodes précédentes deviennent alors inapplicables.
5. Études sur
modèles réduits, mesures hydrauliques
Le
modèle réduit physique est souvent le seul moyen de résoudre un problème
d’écoulement impossible à étudier par le calcul. Il en est ainsi pour la
mise au point d’ouvrages tels que les évacuateurs de crues, les dissipateurs
d’énergie, les barrages et prises d’eau en rivière, etc.
Les
forces agissant sur les fluides et le corps en contact avec eux sont
principalement dues à l’inertie, à la pesanteur, à la viscosité et à la
capillarité. On doit, dans un modèle, conserver les rapports entre les
diverses catégories importantes de forces. En général, il est impossible de réaliser
une similitude permettant la représentation simultanée de plus de deux types
de forces.
Dans
la similitude de Froude, on conserve dans le même rapport les forces de
pesanteur et d’inertie. On obtient ce résultat en réalisant un même nombre
de Froude V/g D sur le modèle et dans la nature. Ceci nécessite
souvent d’introduire une distorsion dans le modèle (échelles horizontales et
verticales différentes).
Dans
la similitude de Reynolds, on conserve dans le même rapport les forces
d’inertie et les forces de viscosité. Les nombres de Reynolds homologues VD/n
doivent alors être les mêmes sur le modèle et dans la nature. Pour y
parvenir, on peut être amené à étudier des phénomènes hydrauliques au
moyen de modèles à écoulement d’air (ou inversement).
Beaucoup
des domaines traditionnellement réservés aux modèles physiques sont
maintenant accessibles aux modèles mathématiques. C’est notamment le cas en
hydraulique maritime des problèmes de protection des ports contre la houle, de
propagation de la marée dans les estuaires, et même de comportement des fonds
mobiles (sables et vases) soumis à l’action des courants et des vagues. Il ne
convient pas cependant de croire à une réelle concurrence entre les deux
techniques. Elles sont beaucoup plus complémentaires que concurrentes. Par
ailleurs, les modèles réduits utilisent eux aussi des ordinateurs, tant pour
assurer leur réglage et leur conduite automatique que pour la collecte des
informations qu’ils recèlent.
Les
grandeurs que l’on a le plus fréquemment à mesurer en hydraulique sont les
niveaux liquides, les pressions, les vitesses et les débits.
Les
niveaux sont mesurés à l’aide d’échelles limnimétriques, de limnigraphes
à pointe vibrante, de détecteurs à capacité, de sondeurs à ultrasons.
Les
pressions statiques et dynamiques sont mesurées à l’aide de manomètres à
liquides et de capteurs de pression traduisant un microdéplacement en un signal
électrique.
Pour
la mesure des vitesses d’écoulement, on dispose de moulinets (hélices à axe
parallèle à la vitesse), de tubes de Pitot, d’anémomètres à fil chaud, ou
d’anémomètres laser à effet Doppler.
Enfin
la mesure des débits utilise les déversoirs, les venturis, tuyères,
diaphragmes, les rotamètres, ou les débitmètres électromagnétiques ou à
ultrasons.
L’hydraulique
moderne recouvre un vaste domaine de connaissances à la fois théoriques et
pratiques qui constituent, pour tout ce qui touche le mouvement de l’eau, ce
qu’il est convenu d’appeler «l’art de l’ingénieur».
Pendant
longtemps on a distingué d’une part, l’hydrodynamique (cf. mécanique des
FLUIDES), branche des mathématiques appliquées et, d’autre part,
l’hydraulique. Cette distinction, due aux différences dans l’approche et la
résolution des problèmes, est de moins en moins justifiée. L’hydraulique a,
en effet, cessé d’être seulement une science de formules empiriques et de
coefficients.
L’essor
des techniques numériques mises en œuvre sur des ordinateurs sans cesse plus
puissants et plus nombreux permet aux ingénieurs hydrauliciens
d’aujourd’hui d’apporter, à la résolution de problèmes concrets, la
rigueur mathématique qui était naguère réservée à l’hydrodynamique
classique.
Cette
harmonisation, de même que la complémentarité de plus en plus grande qui
existe entre techniques numériques et techniques physiques de laboratoire, est
sans doute le trait essentiel de l’hydraulique de la fin du XXe siècle.